La mission qui consiste à faire grandir des enfants, à accompagner le développement de leur personnalité en relation aux autres est grande et belle. C’est celle de l’éducateur. Dans cet article écrit par L.R. Samuel dans la revue Educateurs d’avril-mai 1941 (anciennement revue Le Patronage), l’auteur a cherché à donner des pistes aux éducateurs qui souhaite que l’autorité qu’ils exercent soit féconde.
Toute autorité vient de Dieu
L’autorité nous est confiée par Dieu, Celui qui attend de nous une tâche et souvent pénible, mais qui apporte avec elle de merveilleuses satisfactions. Nous l’emploierons et la cultiverons avec ferveur, car de ce « sacerdoce » nous devons rendre compte à Dieu qui mit en nous sa confiance, et nous offrit le moyen d’accomplir notre vie. Notre pensée sûre de sa force s’appliquera à préciser les fins pour lesquelles elle sera utilisée.
L’autorité de l’éducateur pour aider et perfectionner les enfants,
Educateurs, nous avons devant nous des enfants qui vivent, murissent, se forment. Nous voulons les aider, les perfectionner. Donc il nous faut sans cesse songer à ce que nous voulons qu’ils deviennent. La femme et l’homme harmonieux de demain, nous en sommes responsables. Comme le peintre derrière son esquisse voit et sent le tableau tel qu’il sera achevé, derrière la silhouette de ces petites filles et de ces garçons qui jouent, crient, se battent ou rient, nous pressentons les êtres formés et modelés dont nous voulons réaliser la plénitude. Il ne nous est guère possible cette fois-ci d’étudier ce grave problème dans toute son ampleur. Nous vous demandons d’y apporter toute votre sympathie et toute votre imagination.
et pour développer toutes leurs possibilités
Ne tentez pas d’enfermer le gamin de dix ans dans les cadres étroits d’une destinée dictée. Ce n’est pas vous qui décidez, mais c’est vous qui guidez la personnalité naissante, qui tentez d’écarter les embûches inévitables et de développer au mieux toutes les possibilités. C’est une tâche délicate, et puisque nous pensons à l’autorité de l’éducateur, ne manquons pas d’attirer son attention sur les graves erreurs qu’elle risque de lui faire commettre dans ce domaine.
Le but de l’éducateur est de préparer l’enfant à la liberté
Responsable de la formation du caractère, il doit amener l’enfant qui lui est confié à une forme élevée de la liberté. Son autorité ne doit pas se substituer au libre arbitre de l’adolescent, mais le guider. Pas de ces enfants promis dès leur jeune âge à telle ou telle profession, parce que leurs parents la rêvent ou que leur maître la suggère. Il est des décisions qui appartiennent à l’individu, et notre rôle en tant qu’éducateurs, est de le mettre en état de choisir sa vie en toute connaissance de cause, mais en aucune façon de la choisir pour lui.
Comprendre les enfants est indispensable à l’éducateur
Il est toujours arbitraire de choisir un ordre logique pour examiner les problèmes de l’éducation. Ils sont en réalité, complexes et permanents, et chai se pose à tout instant. Toutefois nous imaginons pour le moment le jeune éducateur, qui sait ce qu’il veut, et aborde sa tâche. Nanti de l’autorité que lui confie son âge, son expérience et sa fonction, il se trouve en présence d’un groupe d’enfants qu’on lui confie. Il lui faut mettre tous les atouts dans son jeu s’il le veut efficace. Sa première tâche est la compréhension.
L’éducateur doit connaître le milieu de vie des enfants…
Qu’il ne pense pas que tous les enfants sont identiques. Qu’il ne pense : surtout que tous sont semblables à ce qu’il était, lui. La diversité des caractères lui apparaitra vite en grande évidence. Mais d’autres facteurs de diversité risquent de lui échapper. Aussi, l’éducateur do-il se pencher sur le milieu social des enfants. C’est aussi et plus encore pour un autre motif : le milieu social est lui aussi un éducateur. Il forme lentement et profondément, avec une permanence plus sûre que celle de votre action.
… en allant au contact des familles.
L’éducateur est donc un personnage social de très grande importance. Or nous savons par les souvent cruelles expériences du passé, qu’il ne doit surtout pas ignorer la structure sociale de son pays, celle surtout des groupes qui lui confient leurs enfants. Il lui faudra prendre la peine d’assurer une enquête soignée ou tout au moins d’apprendre à observer. Il devra connaitre les quartiers, maisons qu’habitent les enfants de son patronage. Il rassemblera des renseignements suffisants pour avoir une idée bien complète de la vie quotidienne des familles.
La cellule familiale a une valeur divine !
Il lui faut parvenir à une compréhension empathique des problèmes humains, du milieu, du climat, de l’atmosphère. Ainsi il sera en mesure d’établir une transition pour l’enfant entre les heures nombreuses où celui-ci reste dans l’ambiance familiale, et les quelques heures où il est confié son autorité. L’enfant comprendra de la sorte que la vie est plus générale que sa petite famille. Et si l’éducateur a su conquérir la confiance, il saura montrer l’enfant la grande valeur divine de la cellule familiale.
S’étant imprégné des problèmes immédiats qui sont la base des préoccupations dont l’enfant, chez lui peut avoir connaissance, l’éducateur pourra les expliquer. Il aura parfois le grand privilège d’être lui-même consulté. Il aura enfoncé les racines de son autorité aux sources mêmes de la vie, et sera en mesure, sur ces bases solides, d’aller du particulier au général, et d’aider le jeune être à comprendre le Monde.
De bonnes relations entre éducateurs et parents profitent aux enfants
Lorsqu’on a à s’occuper de jeunes enfants en pleine période de formation, il est toujours utile et souvent nécessaire d’établir le contact avec les parents. Certains enfants resteront pour vous des énigmes jusqu’au jour où vous aurez eu avec leurs parents une sérieuse conversation, qui vous éclairera sur la vie antérieure des petits, sur leurs maladies, sur leur caractère, sur la structure particulière de leur famille. Vous prendrez soin de rester très objectifs au cours de ces entrevues, et sans décevoir profondément ceux qui par la nature sont persuadés que leur progéniture est exceptionnelle, vous vous efforcerez d’obtenir leur audience, et de les convaincre de collaborer à votre tâche. Ce sera une sévère épreuve de votre autorité d’éducateurs. Mais songez à l’œuvre féconde que vous entreprendrez si vous obtenez que votre influence sur l’enfant se poursuive ainsi à travers sa vie familiale.
Educateurs : soyez vous-mêmes !
(lien vers educateurs cultivez votre perosnnalite que melanie doit mettre)
Nous vous conseillons d’étendre votre information à tout ce qui entoure la vie quotidienne de l’enfant, à son milieu, à sa famille. A l’occasion de ces démarches ne vous croyez pas obligés de vous intégrer vous-même dans ce milieu. Ce serait une grave erreur. L’éducateur doit garder sa personnalité propre. Il détient son autorité de Celui qui lui a confié sa mission, et cela doit être une introduction et un vade-mecum suffisants, sans qu’il soit besoin de se plier à des souplesses ou à des travestissements dégradants. Ne croyez pas surtout que votre autorité soit diminuée si les enfants vous sentent « différents » de ceux qu’ils voient chaque jour autour d’eux. Personne ne vous demande de vous adapter, physiquement surtout … Restez fidèlement vous-même.
Educateurs : cultivez votre personnalité !
S’il n’est pas question de faire effort pour ressembler à ceux avec qui vous devez prendre contact, il est au contraire néces¬saire d’exercer vos dons d’éducateurs sur vous-même d’abord. Un effort de perfectionnement s’impose, car vous devez petit à petit conquérir pour vous tous les atouts qui assureront votre autorité et votre influence. Un effort de perfectionne¬ment s’impose surtout parce que vous devez être un exemple. C’est la pierre de base de l’édifice que vous entreprenez. L’enfant doit sentir devant vous que vos conseils ne sont pas simplement mots creux : Il doit voir comment on fait.
Perfectionnement physique : un atout pour l’éducateur
On reconnait de plus en plus l’importance du développement corporel, tant pour lui-même que pour ouvrir la porte à d’autres disciplines. L’éducateur dirige des promenades, des jeux de grand air, des courses, des sauts. Qu’il ne reste pas inerte devant les enfants qui gambadent, qu’il prenne part activement à leurs exercices, pour souligner l’importance qu’il y attache.
Une partie importante du prestige de l’éducateur vient de sa condition d’adulte en face des enfants. Mais le jeune homme ou la jeune fille sportive, qui ne négligent pas la culture de leur corps, ont toujours sur les enfants une autorité accrue. Ne soyez jamais uniquement l’arbitre du jeu : jouez le Jeu. La vie que vous mènerez au contact des enfants vous offre les possibilités matérielles de ce perfectionnement. Le rôle que vous assumez vous y engage. Ne laissez donc pas passer ces chances magnifiques.
L’entrain et la gaité doivent s’accompagner de patience et de confiance envers l’enfant.
Cultivant son intelligence en enrichissant ses connaissances dans le domaine général et plus spécialement dans le domaine pédagogiques, l’éducateur doit savoir attendre. Le moment d’exercer et d’affermir son autorité, les moyens d’asseoir son influence, l’éveil de la personnalité de l’enfant, cela suppose un lent travail caché, un travail en profondeur pour lequel il ne faut pas d’impatience. El parce que les résultats sont lents il faut garder confiance. Confiance en soi, d’abord, parce que l’on se sait à même de remplir sa mission. Confiance ensuite dans cette matière première qui nous est confiée et qui produira de bonnes œuvres en toute certitude puisque notre ferment est bon, ferment que de travailler avec discernement, notre esprit d’observation a su placer au bon moment, là les résultats sont certains. L’Educateur doit constamment avoir dans son imagination, l’image des êtres harmonieux qu’il veut réaliser. C’est le phare au-delà des soucis quotidiens.
Observer les enfants et s’observer soi-même
Il est nécessaire que l’éducateur ait toujours l’esprit en éveil : loyalement avec sa raison, son intelligence et son cœur, en même temps qu’il s’observe sincèrement lui-même, il doit observer avec impartialité les enfants autour de lui. Toutes ces qualités supposent d’abord un solide optimisme, l’optimisme celui qui connait les écueils de la route, mais qui sait gouverner sa barque voit clairement le chemin : “Paddle your own canoe” disait Baden-Powell.
En possession de lui-même, cultivant le magnifique don que Dieu lui a fait d’être conducteur d’hommes, il reste à l’éducateur, pour remplir parfaitement sa mission et pour en être digne, à connaître en technicien son métier.