Voici un article du chanoine Boyer publié en 1937 alors qu’il était directeur des Catéchistes volontaires du diocèse de Dijon. Si l’éducation religieuse du tout petit se fonde sur du réel, sur la vérité et la vie, celle de l’enfant âgé d’une dizaine d’années aura besoin de s’incarner dans une foi vivante, une confiance totale pour son Père qui est dans les cieux. La figure du Christ comme Fils et enfant de Dieu sera d’une grande aide pour cela.

Comment présenter le « Christ Fils » à nos enfants ?

Modèle des enfants de Dieu, le Christ pense, vit, agit toujours en Fils aimant du Père. Il nousest facile de le montrer, sous ce jour, l’Évangile en main. La scène qui, très opportunément, dans cette présentation, peut nous servir de départ, n’est-ce pas celle de Jésus au Temple ? A douze ans en présence des Docteurs de la Loi, en face de l’incompréhension de sa famille, Jésus fait, si j’ose dire, sa profession de foi solennelle : « Ne saviez-vous pas qu’il faut que je m’occupe des affaires Père ? » (Luc, II,49) Et désormais, en effet, c’est aux affaires de son Père que Jésus va penser avant tout. Dans cette vie quotidienne de travail manuel que la nécessité du pain à gagner lui impose, comme elle s’impose à la plupart des hommes, il ne pensera pas, ainsi que tant d’autres, aux seuls profits matériels que te travail procure, il va penser à accomplir en tout la volonté de son père de la façon qui lui sera la plus agréable : “Je fais toujours ce qui lui plaît” (Jean, VIII, 29), déclara-t-il.

Jésus au Temple, enseignant les Docteurs de la Loi.

“Ma nourriture est de faire la volonté de Celui qui m’a envoyé”

Et quand le Père lui fera savoir que l’heure est venue pour Lui de quitter le paisible foyer de Nazareth, il abandonnera le foyer, il quittera sa mère très aimée, pour être tout œuvre de “Celui qui l’a envoyé” (Jean VI,39) car il ne saurait vivre en dehors de cette volonté souveraine : “Ma nourriture, dira-t-il à ses disciples, qui, après l’entretien avec la Samaritaine, lui demanderont de goûter au repas qu’ils lui ont préparé, ma nourriture est de faire la volonté de Celui qui m’a envoyé (Jean, IV ,34.)” Il vivra ainsi, en Fils, dans un abandon complet, n’ayant même pas une pierre où reposer sa tête, dans une confiance sans réserve. Il connaîtra, en effet, plus que quiconque les oppositions et la haine. Mieux que quiconque, il en pressentira les effets, puisque par trois fois, il prédira sa mort.

Jésus tourne sans cesse ses disciples vers Dieu le Père

Il n’aura jamais d’autre souci que d’orienter vers le Père le cœur de ses disciples, le Père dont il célèbre tour à tour :

  • la puissance (pas un passereau ne tombe à terre sans sa permission, pas un cheveu de notre tête),
  • la sollicitude (n’est-ce pas lui qui nourrit les petits oiseaux et habille les lys des champs
  • la miséricorde (il fait luire son soleil sur les bons et sur les méchants), 
  • l’amour (il a donné aux hommes son Fils unique).

C’est ce Père tout-puissant, prévoyant, infiniment miséricordieux et bon, qu’il faut prier : « Quand vous prierez, vous direz : Notre Père… ». Le Père du Ciel est pour les hommes, à vrai dire, l’unique source de la vie et des biens de la vie, à ce point que la paternité humaine n’est qu’un pâle reflet de la seule paternité véritable : « Vous n’avez seul qu’un seul Père, dira Jésus, Celui qui est dans les cieux(!). »

Représentation de Dieu le Père à la cathédrale de Cambrai.

C’est à Dieu le Père que toute gloire doit remonter 

C’est au Père qu’il fait remonter la gloire de tout ce qui est bien. Après la confession de Pierre, qui lui dit, dans un élan de foi : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant », Jésus déclare : « Bienheureux es-tu, Simon, fils de Jonas, parce que ce n’est ni la chair ni le sang qui t’a révélé cela, mais mon Père qui est dans les cieux (Matt., XVI, 17) ». C’est au Père qu’il rend grâces de ses miracles : « Père, dit-il avant de faire sortir Lazare de son tombeau, je te rends grâces de ce que tu m’as exaucé. Pour moi, je savais que tu m’exauces toujours … (Jean, XI, 41) ».

C’est le Père qu’il prie, longuement, parfois la nuit entière, dans la solitude de la montagne. C’est au Père qu’il demandera le courage pour accepter sa passion. C’est au Père qu’il demande de le glorifier « de la gloire qu’il avait avant que le monde fût (JEAN, XVII, 5). Finalement, c’est entre les mains du Père qu’il remettra, quand tout sera consommé, son âme.

Parler souvent du Christ comme Fils pour que l’enfant pense en enfant de Dieu

Cette présentation du Christ-Fils, qui reviendra au cours de notre enseigne comme un « leit-motiv »  a pour but d’amener peu à peu nos enfants à penser, à agir à son image, c’est-à-dire en enfant de Dieu.

a) Apprendre à penser en « enfant de Dieu ».

Il faut, en effet, que nos catéchisés ne considèrent pas Dieu uniquement comme l’Être premier et nécessaire qui explique l’origine de l’univers. Un être aussi lointain serait sans prise sur leurs âmes qui s’accommoderaient sans peine de sa disparition. Il faut que nous cherchions à leur faire comprendre qu’ils sont, comme le Christ, unis au Père par un lien de vie et cela pour toujours, que tous les biens qu’ils possèdent ils les tiennent de sa libéralité et que tous ceux qu’ils possèderont viendront de la même source, qu’ils ont, dans l’amour du Fils unique de Dieu qui s’est incarné, qui est mort sur la croix, vit dans l’Eucharistie, le gage et la preuve de cet amour infini dont ils ont été, son seront l’objet.

b) Encourager à vivre en enfant de Dieu

Donc dans l’obéissance d’abord, car, Jésus l’a dit, aimer et obéir c’est tout un, obéissance qui doit aller, au besoin, comme l’obéissance du Christ, jusqu’à la mort, dans la confiance aussi, car « qui est comme Dieu ? » La mort du Christ pouvait apparaître à ses disciples comme le plus grand des malheurs. Il leur avait annoncé qu’il serait « scandalisés à cause de lui ». En réalité, elle était la rançon de la Rédemption, elle nous ouvrait les portes du ciel. Les méchants peuvent sembler triompher. Leur triomphe est éphémère. Le Tout-Puissant a l’habitude de tirer le bien du mal et il a, pour lui, l’éternité. Comme il a glorifié le Christ-Sauveur, il reconnaîtra et glorifiera ses enfants.

c) Guider pour agir en enfant de Dieu…

… comme Jésus au Temple, en présence des Docteurs, en présence de Marie et de Joseph qui ne comprennent pas, mais qui comprendront quand il aura parlé, ne craint pas d’affirmer sa fidélité. L’affirmation dans les actes, à la manière humble mais nette du Christ, voilà ce qui fait les âmes fortes. Dans l’Eglise, l’âge de douze ans est celui de la profession de foi solennelle ou Communion solennelle. Tout n’est pas fait pourtant quand on a transformé le caractère de cette cérémonie par laquelle s’inaugure, en présence de tous, une vie chrétienne personnelle. Tout n’est pas fait même quand on a donné cette orientation d’affirmation de la foi à la retraite qui la prépare. C’est le catéchisme entier, de la première à la dernière minute, qui doit se présenter en quelque sorte comme le “noviciat de la vie chrétienne”.

Famille, amitiés, école donneront autant d’occasions à l’enfant d’agir en enfant de Dieu.

Autre chose est la récitation d’une formule, autre chose la vivre. C’est pourquoi, avant de faire prononcer la formule de la Profession de foi, il est important de la faire vivre. Pour cela, la fraternité chrétienne et le climat chrétien dans lequel l’enfant évolue ont un grand rôle à jouer. Cette fraternité chrétienne, elle découle de la fraternité de chacun avec Dieu et de ce que le Christ doit être découvert également comme un “frère”. (LIEN)

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