Voici un article de Bernard Algan, le « médecin de l’équipe » des dirigeants nationaux, qui a été l’auteur de nombreux textes pratiques à destination des responsables Cœurs vaillants. Parmi eux, un article qui développe la pédagogie de l’hebertisme et son intérêt pour les jeunes. Pour Bernard Algan, il était indispensable de se soucier du développement physique et corporel des enfants et adolescents : « les éducateurs français, sans doute par souci d’un intellectualisme outrancier, avaient oublié qu’une éducation totale, exigeait une formation physique. »

Objectif de l’hébertisme : Un esprit sain dans un corps sain

Durant les vacances, nous allons avoir à nous préoccuper de la santé des enfants que nous emmènerons en colonies de vacances ou qui fréquenteront nos patronages. Parmi les moyens mis à notre disposition dans ce but, et d’ailleurs ce sera rendu obligatoire par l’Etat, nous devrons utiliser l’éducation physique qui fortifiera les enfants et leur permettra de reprendre plus vaillamment la prochaine année scolaire. Pour réaliser cette éducation physique, diverses méthodes s’offrent aux éducateurs et seule une vision nette du but poursuivi permettra de choisir. L’hébertisme est la méthode qui a retenu notre attention.

Développer l’enveloppe corporelle de façon utile et harmonieuse

S’agit-il de transformer nos enfants en de petits athlètes à la musculature puissante mais ne possédant pas de résistance physique réelle ? Désirons-nous les voir exécuter d’une manière parfaite des gestes conventionnels ou des exercices d’acrobatie sans utilité pratique ? Certes non. Tout le problème est de développer leur enveloppe corporelle d’une manière complète, utile et harmonieuse. Mais encore, ce développement ne pourrait être qualifié si ce corps, physiquement fort, était au service d’une âme sans énergie, aussi faudra-t-il que les exercices proposés développent concomitamment les qualités viriles indispensables à tout homme digne de ce nom. 

Obtenir l’adhésion des enfants à la méthode de l’hébertisme

Enfin, et ce dernier point fait ressortir d’une manière très nette l’union étroite entre physiologique et psychologique, la meilleure des méthodes d’éducation physique serait absolument inopérante si elle n’obtenait l’adhésion de tout l’être de l’enfant en l’enthousiasmant, tant il est vrai que rien de bon ne se fait que dans la joie. C’est ce triple problème physiologique, moral et psychologique qui devra nous guider dans le choix de la technique d’éducation physique. C’est ce triple problème dont fait harmonieusement la synthèse la méthode d’éducation phy­sique du lieutenant de vaisseau Georges Hébert, appelée par lui méthode naturelle et qui a aussi reçu le nom d’hébertisme.

Les principes de la méthode naturelle selon Hébert (1875-1957)

hébert concepteur de l'hébertisme

Il serait présomptueux de vouloir en un court article exposer complètement la méthode naturelle qui est si vaste, mais nous voudrions, en quelques traits, indiquer ses principales caractéristiques et donner le désir de l’étudier plus à fond dans les ouvrages même du penseur de l’hébertisme. Officier de marine, le lieutenant Hébert parcourut les contrées les plus diverses de notre globe. Lorsqu’il se trouva en présence de peuples éloignés, il fut toujours frappé de l’harmonieux développement physique qu’ils atteignaient et il en étudia soigneusement l’origine. De ses observations répétées et des expériences nombreuses qu’il put faire avec ses marins et à l’école des cadets de la marine, Hébert déduisit le principe doctrinal fondamental de sa méthode dont la technique alla ensuite de progrès en progrès :

« Utiliser les gestes qui sont ceux de notre espèce pour acquérir le développement physique complet. »

Quelques passages extraits du Iivre de Jacques Hébert jetteront la lumière sur les principes de l’hébertisme

« Le mode de travail qui convient le mieux au développement de l’organisme de l’être humain est celui qui est à la base de déplace­ments, sous des formes diverses, avec des efforts variés ; c’est ce que j’appelle le travail naturel ou foncier. Pour l’acquérir, seules importent la nature et la quantité du travail. Donc, l’essentiel est d’obtenir un travail en déplacement et non pas une perfection d’exécution im­possible. » Et ailleurs : Si l’on observe la vie des primitifs, on constate que s’ils arrivent à un développement physique souvent parfait, c’est en pratiquant des activités correspondant à leurs principales nécessités.

Les principaux exercices de l’hébertisme

  1. locomotion normale, c’est-à-dire déplacement à l’aide des seuls membres inférieurs : marche, course, saut.
  2. locomotion secondaire c’est-à-dire déplacement par action conjuguée des membres supérieurs et inférieurs : grimper, marcher à quatre pattes (quadrupédic), nager.
  3. défense : luttes multiples, 
  4. activités utilitaires : tirer, pousser, lever, etc.
  5. divertissements à base d’efforts physiques : danses… accom­pagnés le plus souvent de cris et de chants.

De ces constatations, à fixer les exercices principaux de l’hébertisme, il n’y aurait qu’un pas à faire si la vie moderne ne posait des problèmes importants, surtout le manque de temps et le défaut d’espace. Les exercices les plus utiles seront ceux qui augmenteront la force de résis­tance de l’organisme par le développement complet de la capacité pulmonaire et donneront une puissance plus grande au muscle cardiaque. « L’idéal est donc de produire, dans un temps donné, sans nuire à l’organisme, une dose d’activités à peu près égale à celle que repré­senterait une journée entière de vie au grand air à l’état de nature.

hébertisme

4 conditions pour bien pratiquer l’hébertisme

Ces buts sont atteints par des séances menées suivant une technique rigou­reuse, dans des conditions bien précises, et par un retour aux conditions naturelles de vie.

  1. La leçon aura lieu au grand air, sur un espace restreint (plateau) ou mieux en pleme nature.
  2. Les vêtements gênant les mouvements, seront supprimés, tout en veillant à une décence convenable. La tenue idéale pour l’hébertisme est constituée par le short. Le garçon, si le temps le permet, aura le torse et les jambes nues, les pieds chaussés d’espadrilles.
  3. La leçon d’hébertisme sera constituée par les dix exercices qui constituent le fond de l’activité des primitifs :
    • la marche
    • la course
    • le saut
    • la quadrupédie
    • le grimper
    • l’équilibrisme
    • le lancer
    • le lever
    • la défense
    • la natation.

Ces exercices seront harmonieusement dosés.

4. Enfin, par ces exercices, on développera chez l’enfant des qualités de caractère indispensables. Selon le concepteur de l’hébertisme : « L’entraînement physique est inséparable de la culture virile, c’est-à-dire du développement de certaines qualités morales sans les­quelles un sujet, même très fort, n’est qu’un être incomplet ». « Développer parallèlement le corps et la culture virile au moyen d’exercices violents et dangereux pour développer l’énergie et les autres qualités viriles. »

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