Sainte Anne est fêtée le 26 juillet. De sainte Anne nous ne savons rien que par une tradition parfois discutable et discutée. Pourtant, elle est une illustre sainte ; elle a un titre unique à nos hommages, celui d’avoir la grand-mère du Sauveur, c’est encore vrai. Pour le reste, nous ne saurons rien de certain que dans l’éternité. Il est plus facile de parler de son culte, qui est sa vie prolongée ici-bas. Il ne s’agit pas de la liturgie, ni des statues ou images qui sont si nombreuses. Au Moyen-Âge, sainte Anne fut vraiment la sainte à la mode. On trouve partout son image. Tenons-nous en aux centres de culte. Après avoir noté que dès 550 elle a une église à Jérusalem et dès 636, une autre au Caire, partons en pèlerinage pour quatre basiliques qui lui sont dédiées…
I. Sainte-Anne d’Auray : quand Anne apparaissait en Bretagne…
Son origine remonte à 1623. Mais il y avait eu là déjà une chapelle, détruite quelques siècles plus tôt. Une suite de visions au paysan Yves Nicolazic amena dans cet endroit la découverte d’une statue antique. Il était fermier à Bocenno. Sur la ferme, il y avait un endroit où la charrue ne pouvait passer. Une invisible main arrêtait les bœufs. Enfin, après bien des épisodes qu’il est intéressant de connaître, la dame qui lui apparaissait lui dit : « Ne crains pas, je suis Anne, mère de Marie. Va dire à ton pasteur que je veux qu’on rebâtisse une chapelle. » C’était le 25 juillet 1623. Le pieux laboureur prend des témoins. Tous, sauf deux qui n’avaient pas fait leurs Pâques cette année-là, voient un cierge s’arrêter dans le même endroit. On creuse et on trouve une antique statue de bois…
Une chapelle s’éleva quelques temps plus tard
Le pauvre Nicolazic n’était pas au bout de ses peines : ni son curé, ni son vicaire, ni personne ne voulait l’écouter. Enfin, le curé, frappé dans ses membres et guéri après une neuvaine de pèlerinage à la fontaine Sainte-Anne, reconnaît son erreur. L’évêque à son tour intervient. Alors la chapelle s’élève comme par enchantement. Toute la Bretagne lui apporte sa pierre. La générosité d’Anne d’Autriche, très dévote à la sainte aïeule, est d’un grand secours. La Révolution brûla la vénérable statue, à Vannes, en 1793. La basilique actuelle date de 1866 et la nouvelle statue de 1868. Son socle contient un morceau de la statue brûlée. Celle-ci était du genre dit « Selbdritt », c’est-à-dire qu’elle représentait à la fois sainte Anne, la Vierge et l’Enfant Jésus.
Il. Une relique de sainte Anne offerte par Anne d’Autriche à la chapelle d’Auray
A la jeune chapelle d’Auray, Anne d’Autriche remit, en 1639, une relique de la phalange d’un doigt de sainte Anne. Elle l’avait reçue de la cathédrale d’Apt (photo ci-dessous), en 1623. C’est que cette cathédrale d’avant la Révolution, qui est basilique depuis 1867, est le point de départ de toutes les reliques de sainte Anne qu’on vénère dans l’église entière fût-ce à Rome et à Jérusalem. Cette église a l’insigne honneur de posséder le corps de la grande sainte. Il aurait été apporté là aux premiers jours du christianisme par saint Auspice, le premier évêque. Caché au temps des invasions, il avait été oublié. D’autres récits merveilleux le font apporter sur le rivage de la Méditerranée et enfoui dans le sable par les flots. En tout cas, un jour que Charlemagne passait, avec Turpin, le grand évêque de Reims le fils du comte de Cazeneuve, sourd et muet, attira leur attention sur une vieille Image de l’église. La procession s’arrête, on défonce le mur et l’on ouvre le cercueil. Le jeune sourd-muet recouvre alors la parole. On bâtit une belle église qui devient lieu de pèlerinage.
Anne d’Autriche venait vénérer sa patronne à Apt
En fait, les premiers monuments écrits remontent à la première croisade. L’église actuelle est le centre de l’archidiaconé de Sainte-Anne et Saint-Véran, du diocèse d’Avignon. Son ancienne cathédrale repose sur deux cryptes superposées. Celle qui contient le tombeau de sainte Anne est constituée par des fragments de constructions romaines. L’église a trois nefs. Le collatéral de droite est des Xe et XIe siècles. La chapelle octogonale de Sainte-Anne est du XVIIe siècle. On la nomme la chapelle Royale parce qu’Anne d’Autriche y vint vénérer sa patronne. Le trésor est riche et à visiter. Un vitrail, très mal placé, parce que trop haut, est de 1365 et représente sainte Anne qui porte la sainte Vierge, laquelle porte l’’Enfant Jésus.
Ill. Sainte-Anne de Jérusalem sur le lieu de la maison d’Anne et Joachim
Nous sommes encore en France quoique à Jérusalem. Le territoire de cette basilique a été donné à la France en 1856. Il n’y avait que des ruines. Le gouvernement français fit restaurer le monument. L’architecte le remit dans l’état où il avait été construit au XIIe siècle. L’église fut rendue au culte en 1878 et confiée aux Pères Blancs. Il y avait là une église dès le Vème siècle.Elle occupe l’endroit traditionnel de la maison d’Anne et Joachim. Sous le dallage de l’église est une crypte en partie construite, en partie taillée dans le roc. On y vénère le lieu de la naissance immaculée de Marie.
IV. Sainte-Anne de Beaupré au Canada
Passons en la nouvelle France. C’est le grand pèlerinage du Canada. Il se trouve près de Québec. La construction de la première chapelle fut promise vers 1650, par les marins en détresse. L’emplacement fut choisi par le R. P. Vignal, le 13 mars 1658. Les inondations la firent reconstruire en colombages en 1661 et en pierres en 1676.
Agrandie en 1694 et en 1787, elle fut remplacée par une plus vaste en 1876, Bientôt insuffisante, elle fut encore agrandie en 1882 et en 1886. Le 29 mars 1922 un incendie détruisait tout. Puis, quatre ans seulement plus tard les Canadiens apprenaient avec stupeur qu’un nouvel incendie avait dévoré l’église providentielle 1 le 8 novembre 1926.
Mais une autre basilique commencée en 1924 est à présent terminée quant à l’intérieur. Le Canada a tenu à contribuer à son érection. On l’a voulue belle et riche. Depuis, les foules y viennent chanter les louanges et solliciter les faveurs de celle que l’enfant Jésus put appeler sa grand’maman.