pédagogie active


On dit que le Mouvement C.V.-A.V. utilise la pédagogie active (ou les méthodes actives). Qu’est-ce que cela veut dire ? S’agit-il d’une série de procédés à appliquer ? Non, c’est avant tout un esprit, une manière de penser et de faire, une attitude envers l’enfant, qui doit inspirer tous les actes, toutes les paroles et par conséquent toute la pensée de l’éducateur, et qui réclame de lui une certaine formation. La pédagogie active pourrait se résumer en une phrase : faire expérimenter à l’enfant la liberté pour la faire servir au bien.

Qu’est-ce que la pédagogie active ?

C’est celle qui cherche à éduquer l’enfant en s’adressant le plus possible à sa liberté, à son esprit d’initiative et à sa responsabilité. C’est la méthode qui consiste à faire appel à la collaboration active de l’enfant pour l’intéresser personnellement à sa formation.

pédagogie active

Faire sentir à l’enfant la valeur de sa liberté

La pédagogie active est une méthode profondément chrétienne, car Dieu a créé l’homme libre et Il attend de lui qu’il le serve librement, et non par force. Sinon, il y a dressage, mise au pas, mécanisation, mais pas d’éducation ! Il n’y a de véritable éducation chrétienne que là où l’enfant réagit d’une manière consciente, personnelle et libre :

  • Quel avantage y a-t-il pour le Royaume de Dieu à ce que tous les enfants de cette école récitent chaque jour de longues prières, si aucune de ces prières n’est pensée du fond du cœur (et c’est impossible souvent avec la longueur … et la vitesse !) ?
  • Quel avantage y a-t-il (au point de vue chrétien, sinon au point de vue disciplinaire), à avoir une étude bien silencieuse, si le maitre ne peut s’absenter 10 secondes sans que ce soit le chahut en règle ?
  • Quel avantage y a-t-il à avoir des chefs d’équipe s’ils ne sont que des têtes de colonne pour les rassemblements ! et non des responsables réels dans l’ordre de l’apostolat et de la vie du groupe ?
  • Pourquoi avoir un groupe de 40 bambins faisant leur promesse de la « Croix bleue », puisque ce chiffre même transforme, par son importance, un acte tout personnel en une manifesta¬tion de groupe où l’individu ne se sent nullement engagé par une affirmation qui l’engage devant ses camarades ?

Les résultats obtenus dans un groupe, au point de vue religieux surtout, sont-ils « vrais » ? Ne sont-ils pas « faussés » parce qu’ils seraient « forcés » ? Est-ce que ce sont bien, des consciences qui ont réagi … ou au contraire des automates qui crient : « Tous unis » parce que « ça se fait dans les groupes CV-AV », mais qui se disputent une fois sortis de la cour du patro ?

Encourager l’initiative libre de l’enfant

Il n’y a de réactions chrétiennes conscientes, personnelles, libres, que si on les suscite. L’éducateur ne doit pas seulement avoir du savoir-faire, mais du « savoir faire faire ». Il n’élève pas les enfants pour une serre chaude, mais pour les lancer dans la vie, et la vie sera loin d’être une serre chaude. Un jour viendra où, que l’éducateur le veuille ou non, les enfants auront grandi et seront « livrés à eux-mêmes ». Ce jour-là, seront-ils suffisamment armés ? Il faut donc que l’enfant ait eu d’abord une occasion d’exer¬cer sa liberté, pendant qu’il est encore sous le contrôle de l’éducateur : il faut pour cela que l’éducateur provoque ces occasions afin de susciter des réactions libres. On a en somme l’échelle suivante :

  1. L’éducateur fait tout lui-même (méthode passive) ;
  2. Il impose aux enfants de faire telle chose (idem) ;
  3. Il leur propose de faire cette chose (début de pédagogie active) ;
  4. Il cherche avec eux ce qu’on pourrait bien faire, quitte à mettre son veto si leur proposition est dangereuse (pédagogie active).
  5. Les enfants s’organisent tout seuls mais dans une certaine limite et après un long temps d’apprentissage ; ils font seulement contrôler leurs décisions par l’éducateur, qui reste le Chef, car l’autorité vient d’en haut. La pédagogie active comprenant une auto-organisation poussée qui admet une autorité et une loi supérieure est compatible avec l’esprit chrétien. En effet, en appeler à l’autonomie ou à la liberté sans limite du jeune homme ou de la jeune femme, lui attribuer « un droit premier et exclusif d’initiative, une activité indépendante de toute loi supérieure », ce serait du naturalisme pédagogique condamné par l’Eglise (Pie XI, Encyclique sur l’éducation).

La pédagogie active consiste à faire collaborer l’enfant à sa formation

Susciter des réactions libres, ce n’est ni imposer (et donc détruire la liberté), ni laisser faire (et donc détruire l’autorité). Quelle doit donc être l’attitude de l’éducateur qui veut obtenir de ses enfants des réactions libres, des initiatives ?

L’enfant doit accepter de ne pas faire tout lui-même

Celui qui veut « laïusser » pendant 1 heure à des enfants, peut être sûr qu’ils ne reviendront pas ! Celui qui veut gonfler le ballon, de surveiller la ca¬ban à jeux, de diriger les jeux libres, de faire les affiches pour les coins d’équipe, etc. Il n’en finira plus, sera débordé et ne formera pas des futurs chefs. « As-tu entendu parler de ces Âmes vaillantes qui n’osaient jamais répondre à une question posée par un Au¬mônier national venu les voir, sans regarder d’abord avec inquiétude leur directrice… qui s’empressait d’ailleurs de répondre elle-même. Il ne s’agit pas de « faire joujou toi-même dans le grand Jeu de la Chrétienté, mais de former de bons joueurs. Et ce n’est pas parce que l’autorité vient d’en haut qu’il faut te croire obligé d’avoir une mentalité dictatoriale. »

Il doit donc croire que les enfants peuvent être vraiment des collaborateurs :

La guerre nous a révélé bien des fois jusqu’où peuvent aller les possibilités des enfants. Combien de petits gars évacués ont regroupé leurs camarades, formé des équipes… En règle générale ces faits n’ont pu se produire que là où des éducateurs avaient formé les enfants à prendra des initiatives et des responsabilités. De notre expérience, nous pourrions dire que sur 10 enfants, il y en a bien 5 capables d’initiatives intéressantes et sur les 5, deux capables de devenir de bons chefs.

Avec la pédagogie active, les enfants collaborent réellement

Ne torpille pas sans cesse leurs initiatives une fois que tu les leur as données, sous prétexte qu’ils font des bêtises et que tu feras mieux qu’eux. Dose la part de collaboration à leurs possibilités et fais croître peu à peu cette part, en les encourageant et en les guidant, et en acceptant qu’ils se trompent quelquefois. Il n’y a que ceux qui ne font rien qui ne se trompent jamais ! Si tu avais tout le temps quelqu’un sur le dos pour te « rembarrer » chaque fois que tu commets une erreur, te sentirais-tu la force d’être un chef ?
Il doit enfin avoir une organisation et un programme tels que l’activité, l’initiative et la responsabilité des enfants puissent se donner libre cours :

  • En examinant un questionnaire de reconnaissance A.V., nous avons vu un programme-horaire de groupe, qui ne comportait que 10 minutes de jeu (temps pompeusement baptisé : récréation). Le reste se passait en couture, prières, causerie de la directrice, etc.
  • En examinant un autre questionnaire, nous avons vu que, loin de donner aux enfants l’esprit d’apostolat, on se félicitait de ce qu’elles restaient groupées entre elles à l’école « pour éviter les mauvaises compagnes », ensuite on avouait qu’au moment de l’exode de 1940, ces fillettes dispersées n’avaient pas persévéré « parce qu’elles avaient été livrées à elles-mêmes ! » (Et l’éducatrice ne se doutait pas qu’il y avait corrélation entre les deux questions). Comme si l’ambition légitime du responsable ne devait pas être d’arriver à ce que les enfants puissent « être livrés à eux-mêmes » sans qu’il leur arrive pour cela d’abandonner leur vie chrétienne !

Pour favoriser la pédagogie active, il faut donc :

  • que l’organisation de ton groupe ne soit pas une simple façade, mais fournisse aux petits chefs (de légion, d’équipe) et à ceux qui les entourent, des occasions d’agir personnellement et d’exercer de vraies responsabilités :
  • que dans les activités une place importante soit faite au jeu, ou plutôt que tout soit vu sous l’angle d’un grand Jeu, le grand Jeu de la construction de la Chrétienté où tous les enfants – et non les dirigeants seuls – ont leur place irremplaçable.

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