Convaincu que la bonne humeur est une condition pour rayonner, le Père Gaston Courtois a proposé plusieurs pistes concrètes pour rester toujours de bonne humeur. Ces deux articles sont extraits de l’opuscule « La bonne humeur » du Fondateur des Cœurs vaillants-Âmes vaillantes.
1° La bonne humeur est à demander à Dieu !
Par exemple, répéter souvent, en se rappelant les missions énoncées plus haut, une petite invocation comme celle-ci : « Seigneur, maintenez et développez la joie dans mon âme, malgré les difficultés, les ennuis, les soucis, les souffrances ». Mais cette prière ne nous dispense pas de l’effort personnel. Dieu veut notre collaboration et, pour maintenir la bonne humeur dans notre âme, il faut faire nous-mêmes notre éducation de la joie. Dieu désire beaucoup que nous ayons une bonne humeur constante, mais c’est une grâce de choix, qu’il ne nous accordera que si nous la Lui demandons avec persévérance.
2° Tâchons de chasser de notre esprit tout nuage de tristesse !
Il ne faut jamais nous laisser envahir par des impressions déprimantes. Par principe, il faut chasser les idées noires comme si c’étaient des mauvaises pensées. Ne pas leur donner audience, les mettre à la porte énergiquement. En pensant à nos ennuis, en les ruminant sans cesse, nous ne faisons que les aggraver. Une excellente tactique est de faire suivre immédiatement chaque pensée fâcheuse d’une pensée optimiste !
Si la voix intérieure crie : « Je suis triste », affirmer plus haut : « Je suis gaie ».
Si la voix intérieure crie : « Je n’ai pas de chance », affirmer plus haut : « Tout va bien ». Si l’on se sent envahir par une impression de peine, à la suite d’un mauvais procédé, par exemple, affirmer énergiquement : « Rien ne me froisse, rien ne me vexe, rien ne me fait de la peine ». Non pas pour affirmer ce qui est, mais pour préparer la réalisation de ce que l’on affirme.
Chercher méthodiquement un remède à ses « points noirs »
En cas de brume persistante de l’âme, de cafard obsédant, prendre un papier et un crayon, faire froidement le dénombrement de ses points noirs, les analyser un par un et juger pour chacun d’eux quel est le meilleur remède pour les effacer. Pris individuellement, on arrive plus facilement à les faire disparaître. C’est l’histoire de la fable de La Fontaine : « Le Vieillard et ses enfants. » – Le vrai moyen de rompre un faisceau, c’est de rompre une à une les baguettes qui le composent.
3° Se faire une mentalité de bonne humeur !
Prendre toutes choses du bon côté : « Acquérir à force d’exercice une certaine virtuosité dans l’art de se trouver heureux à bon marché. » (Mgr Keppler). Ne pas être de ceux qui s’attristent de ce que les roses aient des épines ; être de ceux qui se réjouissent de ce que, sur des épines, il puisse pousser des roses. Savoir trouver le bon côté de toutes choses : « Aucun nuage n’est si noir qu’on ne puisse lui découvrir une bordure d’argent. » « Lorsque nous considérons les ennuis de l’existence, avec le verre grossissant de notre mentalité tout humaine, portée à exagérer nos douleurs, celles-ci apparaissent énormes, mais, regardées d’une autre manière, supérieure et surnaturelle, les mêmes difficultés se réduisent à de menues proportions. »
Quid hoc ad aeternitatem ? Quelle importance cela a-t-il par rapport à l’éternité ?
Sous la lentille du temps, certaines choses prennent une importance exagérée ; sous la lentille de l’éternité, elles se réduisent à leur juste valeur et paraissent telles qu’elles doivent être jugées : infinitésimales… Le tout est de prendre la lunette du bon côté…
4° Ne pas attendre de la vie plus qu’elle ne peut donner
« La vie ne doit jamais être tout à fait heureuse, puisqu’elle n’est pas le Ciel, ni tout à fait malheureuse puisqu’elle y conduit. » (Mme Craven). Ne pas s’étonner, par conséquent, de rencontrer sur terre des difficultés et des ennuis ; si tout allait comme nous le voudrions, nous n’aurions pas l’occasion de pratiquer la vertu et d’acquérir des mérites et nous risquerions de nous « installer » ici-bas comme devant y rester toujours. Souvent d’ailleurs, nous nous laissons bouleverser par des choses insignifiantes ; une impression, un petit ennui, une contrariété, au fond rien d’important. Il suffit, pour remettre les choses au point, de se dire : « Bah ! dans quelques années, j’aurai complètement oublié cela et, si je ne l’ai pas oublié, cela me paraîtra bien insignifiant ». En tout cas, quand nous serons au Ciel, comme cela nous paraîtra loin ! …
5° Ne nous laissons pas troubler par la préoccupation de l’avenir et la pensée des malheurs futurs
En nous préoccupant de ces pensées, nous les craignons d’une manière démesurée et nous nous mettons dans un état d’esprit tel que nous contribuons à les faire arriver. Nous avons tort de voir, par imagination, des difficultés et des ennuis qui, après tout, ne sont qu’hypothétiques. Si, dans l’avenir, nous avons des peines, Dieu nous donnera à ce moment-là sa grâce actuelle peur les supporter, mais il ne nous donne pas cette grâce au moment où, par notre imagination, nous envisageons les épreuves que nous pourrions avoir, et c’est pourquoi nous sommes si mal placés pour juger de l’avenir.
Le moment présent est le seul que nous soyons certains de posséder.
Bien des personnes sont impatientes de voir finir les journées, les semaines, les années parce qu’elles escomptent des jours meilleurs. « Ah ! quand je serai grande ! » – « Quand j’aurai ma retraite… », etc. Ce sont de faux calculs et des déceptions. Être content est bien plus l’effet d’une disposition personnelle que des circonstances. Si nous voulons nous préparer au bonheur de demain, exerçons-nous à être heureux du bonheur caché que renferme aujourd’hui. Nous ne savons pas jouir du « beaucoup » que nous possédons, et nous souffrons beaucoup du « peu » qui nous manque…
6° Ne pas être sensible à l’appréciation d’autrui
L’opinion des hommes, qui est si changeante, ne change rien à notre valeur ou à notre mérite. Il est impossible de contenter tout le monde. (Voir La fable de La Fontaine : « Le meunier, son fils et l’âne ».) Faisons notre devoir de notre mieux, faisons-le pour Dieu, qui compte le mérite d’après la bonne volonté et qui sait voir à travers les échecs et les insuccès toutes les bonnes intentions, et alors nous serons en paix. Chose curieuse, la bonne opinion vient tout naturellement à ceux qui agissent par devoir, sans se préoccuper le moins du monde de ce qu’on peut penser d’eux.
7° Se libérer de toute cause d’énervement pour préserver sa bonne humeur
Par exemple, avoir beaucoup d’ordre dans ses affaires, une place pour chaque chose et chaque chose à sa place, c’est le meilleur moyen de les retrouver et d’éviter des pertes de temps et de calme. Par exemple, encore, prévoir l’emploi de son temps ; ce qu’on aura à faire, le moment où il faut partir de chez soi pour arriver à l’heure du train ou se rendre au bureau. Ne pas se laisser déborder ou surmener, ne pas remettre au lendemain ce que l’on peut faire le jour même, etc.
Se libérer de ses caprices et de ses désirs désordonnés.
Plus quelqu’un est maître de lui-même, plus il a en lui un équilibre qui facilite la joie intérieure, et c’est ainsi que la mortification, en nous habituant à dominer les impressions du moment, les caprices et les désirs désordonnés, est une cause de joie.
8° Se mettre cœur et âme à son ouvrage
« Il y a, dans le travail soigné, une source de joie profonde ». On finit toujours par prendre du plaisir à ce que l’on fait bien, et on fait toujours bien ce que l’on fait avec plaisir. Pour bien faire ce qu’on a à faire, aimer son travail, ou le faire « comme si on l’aimait » Lorsqu’on a une chose désagréable à faire commencer par elle, la faire tout de suite s’il est possible, ou bien au moment précis où il convient de l’exécuter, non pas tant pour s’en débarrasser que pour affirmer sa vaillance en « prenant le taureau par les cornes » et en coupant court par là à l’inquiétude, au mécontentement de soi-même, aux tergiversations. « L’énergie gaspillée en différant jusqu’à demain un devoir d’aujourd’hui, suffirait souvent à achever une tâche qu’on devrait entreprendre. »
9° Faire de temps en temps l’inventaire des biens dont on bénéficie.
Dieu, notre Père, nous comble de Ses bienfaits à chaque instant, de biens dont on n’aperçoit toute l’importance qu’au moment où l’on est sur le point de les perdre. Y penser, non pas pour nous en glorifier, mais pour remercier Dieu et nous trouver heureux d’être ainsi comblés.
10° Prendre les apparences de la bonne humeur
L’extérieur agit sur l’intérieur. On finit toujours par devenir ce qu’on s’habitue à paraître. S’affirmer en soi-même que l’on est content, non pour affirmer toujours ce que l’on est, mais pour arriver à devenir ce que l’on affirme. Ne jamais se plaindre de rien ni de soi, ni des autres, ni des événements, d’abord parce que la plainte n’a jamais soulagé personne, et ensuite parce que le fait de se plaindre, au lieu d’arranger les affaires, renforce l’impression que les choses vont mal.
11° Travailler à rendre les autres heureux
Mettre notre bonheur à faire celui des personnes qui nous entourent et, pour cela, s’adapter aux autres, tenir compte de leurs tempéraments, de leurs caractères, les prendre tels qu’ils sont et non pas tels qu’ils devraient être. Découvrir et faire sentir aux autres ce qu’ils ont de bien en eux, mettre leurs mérites en valeur, se réjouir de leur bonheur et de leurs succès, ne jamais les critiquer, ni les humilier, ni les amoindrir.
Voir les gens qui nous entourent davantage sous l’angle de leurs qualités que sous l’angle de leurs défauts. Notre jugement sera plus impartial, d’abord, et il contribuera à « mettre de l’huile dans les rouages ». Faire en sorte que personne ne puisse s’approcher de nous sans être heureux de nous avoir rencontrés.
Calmer nos susceptibilités !
Si un procédé ou une parole nous paraissent blessants, de deux choses l’une : Ou c’est un malentendu (cela peut arriver si facilement !) ; Ou c’est l’expression d’un mauvais sentiment. Si c’est un malentendu, il n’y a pas lieu d’en tenir compte : une explication franche et calme dissipera l’équivoque. Si ce n’est pas un malentendu : « Ou celui qui lance cette attaque est un pauvre homme, aveuglé par sa passion, et je n’en tiens pas compte ; ou c’est quelqu’un d’intelligent, et je lui montre que je suis plus fin que lui, en gardant le calme, la bonne humeur en dépit de ses critiques et de ses railleries ».
Créer autour de soi une atmosphère d’optimisme, de cordialité, de bonne humeur.
Les bonnes distractions ne rentrent pas dans la catégorie du superflu mais dans la catégorie du nécessaire. « Il est mauvais qu’un homme s’applique à son labeur jusqu’à y perdre l’entrain et la joie ». Il faut apprendre l’art de s’amuser sainement et de réjouir les autres, de cultiver la plaisanterie de bon aloi qui permet souvent de dérider les fronts assombris et de créer autour de soi l’atmosphère saine de bonne et franche gaieté. Un bon mot, une plaisanterie, est souvent la meilleure réponse à faire à une objection saugrenue, ou à une question indiscrète. Rien de mieux également pour faire dévier une conversation peu charitable ou peu séante.
Quand le soleil s’arrête dans une pièce, tout se transfigure !
Il y a des boute-en-train qui sont comme de véritables rayons de soleil. D’ailleurs, si l’on agit ainsi, on s’apercevra que la joie est une des choses que l’on trouve d’autant mieux pour soi qu’on la recherche pour les autres. La bonne humeur est contagieuse, la joie est conquérante ; on récolte toujours ce que l’on a semé !
12° Nous réjouir du bonheur de Dieu
Dieu, dans l’unité de sa nature et la Trinité de ses personnes, jouit d’un bonheur infini, dont rien ne peut nous donner idée. Dieu n’a pas de plus ardent désir que de nous faire participer à cette joie : « Pour qu’ils aient en eux ma joie, et qu’ils en soient comblés. (Saint Jean 17, 13) Donc, communier à la joie intime de la Sainte Trinité qui vit en nous. Du Père, qui, dans un éternel présent, engendre en nous son Verbe. Du Verbe, qi en nous ne cesse de louer son Père. De l’Esprit-Saint qui, en nous, est la joie substantielle et du Père et du Fils.
« Quelque triste que je sois, quand je me mets au pied de l’autel et lorsque je dis à Notre-Seigneur : Vous êtes infiniment heureux, rien ne vous « manque », je ne puis faire autrement que d’ajouter : « Alors, moi aussi, je suis heureux, rien ne me manque, votre bonheur me suffit ».
Charles de Foucauld